Au coin perdu, bar

Et bien le pauvre homme n'avait certainement pas eut de chance pour que les ennuis cascadent de la sorte sur son chemin. Kaien se dégagea avec un peu de peine des mains énergiques qui le secouaient avant de voir l'homme s'effondrer. Il lui tappota gentiment le dos entre les homoplates.

"Allons, allons, ça va aller."

Dit-il simplement utilisant les mots habituels dans ce genre de situation. Quand l'autre lui demanda sa vie, il ne put s'empêcher de passer une main sur sa nuque et de répondre franchement, sa voie se teintant de douleur.

"Mon meilleur amis a essayé de me tuer pour accomplir un rituel magique. Je l'ai tué moi même pour me défendre mais ça a libérer une créature de flamme qui a brulé tout mon village et je suis le seul survivant, sans argent ni famille."

Quand le troisième client approcha, Kaien recula un peu sur sa chaise, laissant le dos de Walter en observant la stature imposante du nouvel interlocuteur. Il se sentait soudain très insignifiant.

"On discute..."

Dit-il d'une voie un peu hésitante. Il préférait vérifier que l'autre ne lui défoncerais pas le crâne avant de se détendre.

Après avoir entendu le discours de son nouvel ami, seuls les longs mois d'expérience que les voyages du pisteur lui avaient inculqués l'empêchèrent de fondre en larmes. Il y avait vraiment des gens sur lesquels le destin s'acharnait, et qui se retrouvaient seuls survivants de leur village natal. C'était véridique, et pas drôle du tout.

Ce qui était plus drôle en revanche, c'était l'allure du chapeau de l'autre homme présent dans la taverne. Même si Walter n'avait pas le cœur à rire, il se dit en revanche que ce couvre-chef avait quelque chose de familier. Et tout en se joignant à la conversation, Grand-chapeau lui lançait un regard, mais vraiment particulier et lourd de sens...

Soudain la vérité le percuta tel un vol de skavens enragés.

-Vous!

C'était lui, l'homme assis à côté d'Eisenkopf lors du procès qui devait avoir été le pire moment de son existence, le répurgateur qui comptait parmi les hommes qui en voulaient le plus à sa peau. Ces gens étaient les plus fous lorsqu'il s'agissait de faire respecter la loi. Walter avait déjà la main sur son épée.

-Quand me laisserez-vous tranquille? J'ai déjà libéré plusieurs villages de l'Empire. J'ai droit à un peu de repos, vous ne pensez pas?

Visiblement, le plan avait fonctionné.
Walter l'avait reconnu, et l'autre homme, si son ouïe était bonne - et elle l'était - avait parlé de magie, de village brûlé et de créature échappée... il était sorcier! Et s'il ne l'était pas, il avait été contaminé, affecté, corrompu, même.
Tous deux, ils méritaient la purification que seul le bûcher pouvait amener.
Se levant doucement, réajustant son chapeau pour lui redonner un air ténèbreux, le répurgateur se leva, posa son vere, salua le barman et s'adressa une dernière fois à Walter:
"Je vais garder cette porte, personne ne pourra en sortir ou y entrer! Des gardes armés seront là pour t'attendre, félon! Profite bien de ton dernier verre, avant de rendre ta tête à l'Empereur!"
Et il sortit, content de son effet.

Walter s'était attendu à ce genre d'effet. Argumenter n'avait servi à rien, pas plus que la menace d'en venir aux armes. De toute façon, il doutait d'être de taille à se mesurer à une saleté de répurgateur. Mais bon, puisque ce dernier avait clairement spécifié ses intentions, il n'y avait plus de raisons de s'inquiéter. En fait, à ce point de la conversation, même déprimer devenait obsolète. Il s'adressa à nouveau au premier individu, en prenant un ton de conversation.

-Vous voyez? C'est exactement ça le problème: pas moyen de raisonner avec ces gens-là. Ils te mettent sur un bûcher pour un oui ou pour un non, et plus moyen de leur faire changer d'avis ensuite. ça me donnerait envie de prêter allégeance au chaos rien que pour avoir une raison de se faire cramer.

Il n'avait pas vraiment envie de franchir cette porte, pas avant une nouvelle série de bières en tout cas.

-Je te paie la suivante? J'ai gagné quelques couronnes récemment. Et puis quand tout le monde veut votre peau, autant s'occuper comme on peut lorsqu'il n'y a personne d'autre dans la taverne.

Kaien hocha simplement la tête aux mots de Walter. Après tout, il était bel et bien lui aussi en position d'être brûlé sur un bucher. Le convocateur effleura son collier du bout des doigts, voyant mentalement les créatures qui étaient liées à l'objet. Il se dit vaguement que l'image de la diva remonterais surement l'humeur de son compagnon mais il répugnait trop à exposer ses dons, surtout vu ce qui venait de se passer.

"Merci mon gars. Il doit certainement y avoir une porte de derrière quelque part. Ou une fenêtre pour filer en douce."

Momir Vig pourra la porte et se rendit immédiatement compte qu'il y avait un problème.
L'architecture de la salle et l'aménagement des meubles lui fit comprendre immédiatement qu'il n'était plus chez lui.
La présence de deux hommes lui fit comprendre qu'il n'était même pas sur son monde. Dans Ravnica, une taverne était toujours occupée par de nombreux clients, et jamais d'une seule race. Il avait dû transplaner, par il ne sut quel méthode involontaire... il verrait une autre fois.
Il avait décidé d'aller boire, c'était certain, et il était dans une taverne. Les détails n'avaient pas besoin de compter pour l'instant.
Il s'adressa au tavernier (un humain) et fit comprendre qu'il voulait de la bière, à teneur élevée de levure.
Il vit les autres humains, assis là, et se dit qu'étant le seul elfe présent, il serait peut-être isolé, puis se souvint, un sourire aux lèvres, que cela faisait longtemps qu'il était le dernier survivant de sa race.
Vig s'assit à côté des deux autres, bien décidé à ne pas paraitre antisocial. Il était peut-être l'un des quatre êtres les plus intelligents du monde, il n'en était pas moins un chercheur, un scientifique, un être de contact. Ses recherches sur les êtres vivants lui avaient amené beaucoup d'informations sur le comportement des humains - entre autres.
"Messieurs, bonjour, vous êtes également en pause?"

Spoiler:

Walter scruta le nouvel arrivant en se demandant à quelle race il pouvait bien appartenir. Certainement pas une race autorisée en ville en tout cas. De plus, il avait l'air bien puissant. Peut-être y avait-il là une porte de sortie.

-Non, mais il y a un fanatique décérébré dehors qui fait une fixation sur l'idée de nous envoyer au bûcher. Et m'est avis que vous y passeriez aussi s'il vous voyait.

Il se leva et serra la main de Kayen pour lui souhaiter bonne chance.

-Nous allons quitter la taverne immédiatement. Peut-être n'a-t-il pas encore fait venir d'autres gardes. Si vous voulez nous accompagner, c'est tout de suite, avec sûrement un petit combat à la clé. Bonne chance!

Sur ces paroles, il dégaina son épée, se faufila discrètement jusqu'à l'entrée, et, après s'être assuré qu'il n'était pas le seul à s'être déplacé, franchit le pas de la porte vers l'extérieur.